Définition et Incidence
Le syndrome de Silver Russell associe un retard de croissance intra-utérin sans croissance de rattrapage postnatale, avec plusieurs caractéristiques morphologiques et une asymétrie des membres.
On ne connaît pas précisément l’incidence de ce syndrome mais elle se situe entre 1/50.000 à 1/100.000 naissances vivantes et plus de 500 cas sont rapportés dans la littérature (1).
Symptomatologie
De nombreuses caractéristiques ont été décrites dans le syndrome de Silver Russell et expliquent la grande diversité phénotypique qui le caractérise (2,3).
Les signes suivants se retrouvent dans la majorité des enfants présentant cette maladie:
On observe fréquemment:
On retrouve plus rarement:
Etiologie
L’étiologie du syndrome de Silver Russell n’est pas encore connue. Une disomie uniparentale maternelle du chromosome 7 (c’est-à-dire que l’enfant hérite de deux copies maternelles de chromosome 7 sans contribution paternelle) a été retrouvée mais ne représente que 7% des cas. D’autres anomalies génétiques ont été décrites comme la délétion du chromosome 15 ou la translocation du chromosome 19. Il existe également quelques cas de transmission autosomique dominante (1). Dans la majorité des cas on ne retrouve aucune anomalie chromosomique et le diagnostic de Silver Russell ne peut être posé que sur base clinique et repose sur les caractéristiques phénotypiques décrites plus haut.
Suivi et prise en charge globale
Moyennant une prise en charge adaptée, les enfants Silver Russell peuvent rattraper une croissance staturo-pondérale dans les normes et suivre une scolarité tout à fait normale avec leurs pairs.
La prise en charge du syndrome de Silver Russell repose la plupart du temps sur le trépied suivant :
1. Le support nutritionnel et le traitement des troubles digestifs
2. Le traitement par hormone de croissance
3. La prise en charge par la kinésithérapie (y compris l’éducation de l’oralité) et la psychomotricité.
Assurer une croissance staturo-pondérale correcte repose d’abord sur l’évaluation des ingestions (bilan calorique précis) par rapport aux dépenses énergétiques qui sont la plupart du temps de l’ordre de 1.3 à 1.5 x la norme pour l’âge. En effet, l’apport calorique est généralement insuffisant voire insignifiant et nécessitera la mise en route d’une nutrition entérale (soit par sonde naso-gastrique, soit par gaststrostomie) afin d’apporter le complément calorique nécessaire. La nutrition entérale sera idéalement administrée la nuit en continu (Nutrition entérale nocturne à débit continu NEDC), excepté dans les cas où des hypoglycémies surviennent après de courtes périodes de jeûne (<2h). Dans ces cas, la nutrition entérale sera administrée en débit continu 24h/24 via une pompe volumétrique portable dans un sac à dos.
Des troubles digestifs (4) sont souvent présents et doivent être diagnostiqués pour être traités. Il s’agit souvent de RGO que l’on traite dans un premier temps par médicaments (Dompéridone ou Cisapride, Ranitidine ou IPP). Il n’est pas rare de rencontrer des enfants avec un RGO clinique évident et fréquent (contribuant d’ailleurs à l’insuffisance d’apport), chez qui les investigations digestives (pH-métrie, endoscopie, scintigraphies) sont dans les limites de la normale. Néanmoins, ignorer un RGO dans ces conditions entrave la bonne conduite du support nutritionnel. Les résultats du traitement médical du RGO sont d’ailleurs souvent limités et conduisent fréquemment à proposer une cure chirurgicale anti-reflux (Nissen ou Toupet avec ou sans pyloroplastie en fonction de l’existence d’un retard de vidange gastrique).
Le traitement par hormone de croissance est le traitement le mieux connus du syndrome de Silver Russell (6,7). Il est généralement proposé après l'âge de deux ans, même dans le cas où il n'y a pas de déficit complet en hormone de croissance. L’hormone de croissance a un effet stimulant de l’appétit mais rarement assez important pour suffire à elle-même. L’expérience dans notre série démontre l’utilité première du support nutritionnel sans lequel un traitement par hormone de croissance ne devrait pas être proposé.
La Cyproheptadine est proposée comme antagoniste des récepteurs de la sérotonine et pourrait donner des espoirs dans la prise en charge de ces patients surtout comme stimulant de l’appétit.
Enfin, la psychomotricité et la kinésithérapie doivent être précocement entreprises chez ces enfants, la plupart du temps hyperkinétiques. La stimulation de l’oralité et la logopédie feront partie intégrante de leur programme de (ré)éducation.
Les asymétries corporelles nécessitent parfois des corrections chirurgicales et doivent être suivies par un orthopédiste.
La prise en charge adéquate de ces enfants comprend donc un suivi chez :
1. Le pédiatre, le gastro-entérologue pédiatre, le diététicien
2. L’endocrinologue pédiatre
3. L’orthopédiste et l’ORL
4. Le kinésithérapeute, le logopède, …
Références
1. Molecular genetic studies of human chromosome 7 in Russell-Silver syndrome ; Nakabayashi K et al ; Genomics 2002 Feb ;79(2) :186-96
2. The spectrum of Silver-Russell syndrome : a clinical and molecular gentic study and new diagnostic criteria ; Price et al ; J Med Genet. 1999 Nov ; 36(11) :837-42
3. The MAGIC Foundation ; Asbl Association Libre d’Informations sur la Croissance des Enfants « Silver Russell » ; www.alice.be
4. Gastrointestinal Complications of Russell-Silver Syndrome : A Pilot Study ; Jeff Anderson et al ; American Journal of Medical Genetics 113 :15-19 ;2002
5. Feeding problems in Silver-Russell syndrome ; Blisset J, Harris G, Kirk J, Developmental Medicine and Child Neurology 2001, 43 :39-44
6. Growth hormone treatment of Russell-Silver syndrome ; Stanhope R, Albanese A, Azcona C ;Horm Res.1998 ; 49 Suppl 2 :37-40
7. Growth and symtoms in Silver-Russell syndrome : review on the basis of 386 patients ; Wollmann H.A., Kirchner T., Enders H., Preece M.A., Ranke M.B. ; Eur J Pediatr (1995)154 :958-968